► Mardi 13 mars 2012
Exiger des syndicats une ancienneté minimale de deux ans n'est pas contraire au droit européen et international
Un syndicat créé en 2010 n'est pas invité à négocier le protocole d'accord préélectoral d'élections organisées en 2011 au sein d'une entreprise implantée sur son ressort géographique. L'entreprise justifie cette mise à l'écart par le fait que le syndicat n'ayant pas deux ans d'ancienneté, il ne justifie pas des critères requis à l'article L. 2314-3 du Code du travail qui oblige l'employeur à les inviter à la participation aux élections professionnelles. Le syndicat saisit le tribunal d'instance qui rejette sa demande et juge que le syndicat, ne répondant pas aux conditions d'ancienneté requises prévues à l'article L. 2314-3 du Code du travail, ne peut être invité à la négociation préélectorale. Le syndicat se pourvoit en cassation en soutenant que l'article L. 2314-3 est contraire à plusieurs textes européens et internationaux (Déclaration universelle des droits de l'homme, convention OIT n° 87 sur la liberté syndicale, Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne etc.).
La Cour de cassation rejette le pourvoi : « l'exigence d'une ancienneté minimale de deux ans subordonnant la présentation par une organisation syndicale de candidats au premier tour des élections professionnelles constitue une condition justifiée et proportionnée pour garantir la mise en oeuvre du droit de participation des travailleurs par l'intermédiaire de leurs représentants et l'exercice par le syndicat de prérogatives au sein de l'entreprise, sans priver tout salarié de la liberté de créer un syndicat ou d'adhérer au syndicat de son choix, et ne porte dès lors atteinte à aucun des textes invoqués par le moyen. ». Ainsi, l'article L. 2314-3 du Code du travail étant applicable, la chambre sociale en déduit que l'employeur n'avait pas à convoquer le syndicat créé depuis un an seulement à la négociation du protocole électoral des élections professionnelles organisées dans son entreprise, et déboute le syndicat de sa demande de dommages et intérêts.
Rappelons que la Cour de cassation, saisie précédemment par le même syndicat pour les mêmes les élections professionnelles, a, par un arrêt du 20 octobre 2011 (Cass. soc., 20 oct. 2011, n° 11-60.203 : JurisData n° 2012-003046) refusé également de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel, estimant qu'elle « ne présente pas un caractère sérieux dans la mesure où l'exigence d'une ancienneté minimale de deux ans subordonnant la présentation par une organisation syndicale de candidats au premier tour des élections professionnelles constitue une condition justifiée et proportionnée pour garantir la mise en oeuvre du droit de participation des travailleurs par l'intermédiaire de leurs représentants et l'exercice par le syndicat de prérogatives au sein de l'entreprise, sans priver le salarié de la liberté d'adhérer au syndicat de son choix, et ne porte atteinte à aucun des principes invoqués ».
La Cour de cassation n'a également pas jugé utile de saisir le Conseil constitutionnel d'une question prioritaire de constitutionnalité relative à cette même condition d'ancienneté requise pour la constitution d'une section syndicale dans l'entreprise, au motif d'un attendu rédigé dans des termes semblables à ceux de l'espèce (Cass. soc., 30 nov. 2011, n° 11-40.072 : JurisData n° 2011-026626 ; JCP S 2012, 1088, note B. Gauriau).
Cass. soc., 29 févr. 2012, n° 11-60.203, FS-P+B, Syndicat UDSPA-salariés c/ Sté Brunier : JurisData n° 2012-003046